Another one bites the dust

Cabinet Ktorza - Olivier Pinson, ex-DRH de France Télévisions

Olivier Pinson, DRH pour France Télévisions (2019-2021), va partir. Profitera-t-il du délai de préavis pour réparer les dommages occasionnés à ses ouailles ?

L’info n’a pas éclaté en coup de tonnerre. Elle n’a pas buzzé à travers les réseaux sociaux. Après tout, ce n’est que le énième départ, à la direction RH, en dix-huit mois. Un non-événement, donc. Mais un symptôme.

Nous proposerons prochainement une analyse de ce turnover, à l’occasion d’une série de chroniques dédiée aux entités dirigeantes de France Télévisions. Pour l’heure, nous voulons simplement saluer le sortant. 

Il ne s’agit guère de tirer sur l’ambulance, mais de resituer l’info dans un salutaire contexte de droit et de justice. 

Rappelons donc qu’un DRH est responsable des dommages subis par les gens dont il la charge. Il est même payé pour ça. Il ne peut pas disparaître en se contentant de prévenir ses collègues mais sans un mot en direction des victimes. Et sans même offrir de corriger.

Or à l’heure de son départ, Monsieur Pinson n’a plus de comptes à rendre à l’hydre RH qui l’a pressurisé, qui l’a contraint. Il est à nouveau libre, de ses choix, de sa parole, de son humanité, libre d’agir selon l’honneur. 

Donc…

Corriger, envers la journaliste blacklistée 

Monsieur Pinson peut corriger la situation folle d’un procès fou. En résumé : 

Une journaliste de Télématin, placée en principe sous sa protection, subit un harcèlement judiciaire hors norme, pour avoir demandé régularisation de ses contrats précaires.

Depuis la prise de poste de ce DRH ( en 22 mois, donc ), on déplore au moins cinq audiences devant trois juridictions différentes. 

Plusieurs décisions vont condamner France Télévisions < en lien, l’arrêt de la cour d’appel du 20 février 2020, et le jugement du juge de l’exécution du 17 mai 2021  >

A ce jour, le sinistre judiciaire totalise 166 000 euros de dommages et intérêts, sans compter 2 ans de rappels de salaire ! 

Sur le plan financier, c’est une catastrophe RH, cruellement simple à comprendre :  

Au lieu de payer un salaire de 100 à une journaliste, on va finir pas lui payer, sans qu’elle ait pu travailler, 400 en dommages et intérêts et pénalités.

Et on va encore être obligé de lui payer, en arriérés, le salaire, les 100, dont on l’a privée.

En tout, donc, à la victime : 500.

Et ce n’est pas tout : il a bien fallu payer, d’autre part, le salaire de 100 à celle qui l’a remplacée. 

Soit, 500 à la victime, et 100 à la remplaçante. 

Total général : 600.

Un service RH qui génère un coût de 600 au lieu de 100, juste pour couvrir une gestion illégale… quelle direction financière laisserait se commettre de tels sinistres ? 

Et sur le plan humain, qui s’inquiète de la violence exercée contre cette femme de télévision ? 

Qui va s’excuser au nom du service public sinon le DRH qui représente l’entreprise ? 

Et enfin, sur le plan légal, qui va régulariser le contrat auquel a droit la victime, sinon le DRH en charge ?  

Laissera-t-on Monsieur Pinson corriger ? Peu importe, la journaliste y parviendra sans lui. Mais lui, à son départ, conserve une dette : dire la vérité. 

Notamment au juge. Car c’est bien, de témoigner de la vérité en justice. Oui, c’est bien. C’est moral. C’est réparateur. 

Qu’à la prochaine audience, il se présente, citoyen libre, DRH repenti, frère en humanité d’une femme de télévision. 

Les juges ne le mangeront pas. Ils diront le droit et lui, ayant témoigné loyalement, n’aura plus besoin de demander à ses médecin et psychologue personnels de réparer ses traumatismes.

Corriger encore, envers le réalisateur blacklisté 

A un réalisateur de Télématin, exclu des plannings – en octobre 2019 alors que Monsieur Pinson étrennait ses prestigieux galons de DRH des Programmes -, le Conseil de Prud’hommes vient de rendre son poste sous astreinte. 

Coût provisoire à la charge non pas des responsables mais de la redevance : 200 000 euros 

( total des condamnations arrêté au 31 décembre 2020 ) 

Pour cette voie de fait, prouvée, établie en justice, qui doit porter la lettre d’excuses sinon le DRH en charge ? 

Qui l’oblige à enfouir en faisant appel ? 

Quand arrêtera-t-on ce harcèlement, contre un homme qui, sur le terrain, fait la télévision, tandis que le harceleur, lui, ourdit sa nuisance depuis son bureau canapé de salon en télétravail ? 

Aujourd’hui libéré, Monsieur Pinson a toute latitude pour agir selon l’honneur.

Corriger surtout envers les Télématins et tous les « transférés »

Universitaire, maître en droit social, Monsieur Pinson est indiscutablement un spécialiste. 

Praticien en droit social depuis 20 ans, Monsieur Pinson est tout aussi certainement un expert. 

Donc :

Il sait, sans le moindre doute, ce que vaut cette affaire d’externalisation de la production des magazines, avec transfert forcé des contrats de travail. Rappelons qu’il s’agit d’un montage juridique, fourni au service RH, qui prétend aujourd’hui faire perdre leur statut à plusieurs dizaines de salariés, sans leur accord. L’artifice est si grossier que la direction RH a bien pris soin de laisse Monsieur Pinson affronter les victimes. Or lui, il sait ce qu’il en est.

A-t-il cru que la loyauté envers sa hiérarchie commandait de désinformer le personnel ?

Peut-être, mais il est désormais libéré du tropisme d’obéissance aux ordres scélérats. Le temps est venu, pour lui, de dire la vérité aux salariés qui l’interrogent. De réinsérer un peu de droit dans la relation éminemment toxique qu’entretient le service RH avec les gens qui travaillent.

Corriger, ne serait-ce qu’en disant enfin la vérité, c’est que nous suggérons à Monsieur Pinson.

Et que bonne chance l’accompagne pour l’avenir.

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Photo : FG / Bauer-Griffin

Texte : Oury Attia

Maquette : Nimtsa Web Design

Avocats plaidants côtés salariés : Karima Saïd pour la journaliste, Joyce Ktorza pour le réalisateur

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